Au coeur des vastes palais de la mémoire

Assis au milieu des marguerites et primevères, Augustin Levasseur méditait.

Pour lui qui avait passé toute sa vie en débauches absurdes et en vaines luxures, n'était-il pas trop tard pour revenir dans le droit chemin de la vertu ? En tous cas, c'est ce que Dieu avait dit. Son Dieu. Il lui avait parlé, et à lui seul. Il l'avait jugé digne de confiance pour rétablir la vertu dans l'humanité. Par conséquent, il devait se montrer digne de cette confiance. Il devait montrer la lumière à ses pairs. Désormais, il se nommerait Saint Augustin, et pour lui il n'y aurait plus de gourmandise, plus de péchés charnels, plus de perdition dans les vils plaisirs musicaux. Rien qu'une dévotion pure et entière à son Dieu qui s'était révélé à lui, et dédiée à la mise en branle de l'Église qu'Il lui avait ordonné de bâtir.

Bon.

Mais par où commencer ?

Augustin écarta d'office l'idée de se servir du talisman offert par Dieu. Les incroyants ne sauraient comprendre la différence drastique entre cet objet et un vil produit manufacturé par les Jokers. Il fallait autre chose. Quelque chose que nul ne saurait mettre en doute.

Brusquement, une idée surgit dans la tête et lui attira un sourire : pourquoi ne pas évoquer l'oubli ? Lorsqu'on oublie quelque chose, non content de se montrer profondément imparfait, on se souvient encore de l'avoir oublié, ce qui est une preuve directe que Dieu ait apposé sa marque sur la mémoire. Et nul ne contesterait que les Jokers soient capables d'oubli, là où Dieu ne l'est pas, puisqu'il se souvient encore d'eux plus d'un million d'années après leur avoir donné le jour...

Oui, pas de doute, ça ressemblait indubitablement à une bonne piste.

Mais comment perfectionner ce raisonnement pour le rendre totalement infaillible ?

Augustin recommença à se perdre dans ses pensées...

[Si quelqu'un veut aider cet humble fidèle dans son cheminement intellectuel... ^^]